A croire que tu es habituée à la souffrance … alors que c'est tout l'inverse. Tu n'es pas une gamine des rues, Siam, tu as grandie dans un écrin de velours, tu es née avec une cuillère argentée et même ornée de diamants dans la bouche, ton père te couve comme si tu étais une chose précieuse et fragile, au point d'avoir mis à la porte un nombre incalculable de nounous, de majordome et autre personnel de maison lorsqu'il t'arrivais de te cogner, ou même de tomber comme n'importe quelle gamine au monde. Et pourtant, contre toute attente, il semble que malgré tout tu ne sois pas du genre à hurler ou pleurer sous la douleur, estimant probablement que tu n'en as pas le droit parce que cette blessure découle de tes actions, et de tes choix.

Fort heureusement, le vieux bonhomme ne s'attarde pas plus que de raison sur ta main et lorsqu'il s'éloigne, tu relâches la pression, osant même une remarque légère destinée à l'homme qui t'as amené jusqu'ici, te sauvant probablement de ta solitude et de ta détresse. « Je le suis toujours. » Tu réponds, à sa remarque sur la prudence. Tu ne l'es pourtant pas assez de toute évidence, ou alors as-tu simplement manqué de chance pour cette fois ? Dans tous les cas, lorsque le médecin revient et vous annonce à tous les deux qu'il a besoin que vous lui fassiez de la place pour une autre urgence, tu sautes de la table d'auscultation pour retrouver le sol, et si ça tangue légèrement, cette fois au moins tu tiens sur tes jambes. « Je vais mieux. Je survivrais. » Nouveau sourire alors que tu remercies le vieux monsieur d'un signe de tête avant de te mettre en marche, sans trop forcer pour quitter la sécurité de son cabinet médical improvisé.

A l'extérieur, il fait étrangement doux malgré la saison et l'heure tardive, ça ne t'empêche pas de frissonner à cause du contraste avec l'intérieur, avant de te tourner à nouveau vers ton sauveur du jour. « Merci Inaki, sans toi je serais encore dans cette ruelle à me demander quoi faire. » Et peut-être que les types qui t'ont fait ça seraient parvenus à te remettre la main dessus, qui sait ? Tu ne sais même pas s'ils ont continué de te chercher, tu espères qu'ils ont lâché l'affaire en te voyant décoller dans les airs. « Je ne voudrais vraiment pas abuser mais … par rapport à ce que tu as vu … » Ah oui, parlons-en, hein, de tes ailes qu'il n'a pas pu manquer. Il n'a pas eu l'air de s'en formaliser plus que de raison, mais peut-être a-t-il mis ça de côté sous l'urgence de la situation. Dans tous les cas, tu aimerais autant que ça ne s'ébruite pas, et surtout, que cette histoire de jeune femme possédant des ailes blanches comme celles d'un ange ne soit pas associée à ton prénom. Ton père pourrait facilement faire le lien. « J'aimerais que tu évites de parler de mes ailes à qui que ce soit … et que ça reste entre nous. Je n'ai pas envie que ça se sache partout en ville et que ça arrive aux oreilles de certaines personnes. »